Fatatras !

Au Poche Montparnasse, un heureux spectacle en hommage à Prévert

Chacun a « son » Prévert : le poète, le cinéaste, le surréaliste, l’anarchiste,… On retrouve les multiples visages de l’auteur de Paroles dans le spectacle mis en scène par Gérard Rauber et délicatement, et délicieusement, interprété par Anne Baquet, dont l’enfance a été bercée par le poète, et Jean-Paul Farré, le facétieux comédien. L’entente des deux artistes sur scène relève de la complicité dans l’ambiance cabaret de la petite salle du Poche. On devine, sous des toiles couleur écrue, des meubles, des accessoires… qui vont trouver leur place tout au long du spectacle. Pas besoin d’être statique pour dire les textes, et les deux comparses ne ménagent pas les déplacements. Ils jouent avec l’espace comme avec la musicalité de l’écriture de Prévert. A chacun son registre, elle, la chanteuse lyrique, lui, l’interprète lunaire mais avec en partage la fantaisie, et l’esprit d’enfance de l’homme à la cigarette. Anne Baquet, de sa claire voix de soprano, chante des classiques éternels (Chanson pour les enfants l’hiver, A la belle étoile,…), sur les musiques de Kosma, d’autres, comme Barbara ou Les feuilles mortes, sont redécouverts, dits par Farré rejoint par la chanteuse, dans de nouveaux arrangements de Damien Nédonchelle.

Un orgue de Barbarie

L’assemblage des textes est habilement composé, dans un dynamique et un rythme passant de la poésie à l’humour, de la veine politique et sociale au surréalisme. La mise en scène est légère, enlevée et ludique dans la scénographie de Marguerite Danguy des Déserts. Les textes (La chasse à la baleine, bien sûr, mais aussi Chez la fleuriste, Quelqu’un, Il faut passer le temps,…) alternent avec les chansons. Les accessoires surgissent à point nommé pour accompagner les différents textes, dialogues, chansons ou encore des aphorismes humoristiques ou des charades. Un orgue de Barbarie, un piano à queue miniature, des triangles suspendus à un parasol, un clavier sorti d’une malle, une crécelle, tout tombe à pic pour jongler avec les mots, faire vivre l’esprit de Prévert, le remettre dans l’air du temps. Entendre et ré-entendre Prévert, rouvrir son inventaire, un programme à ne pas manquer.

Fatatras !           * * *

Théâtre de Poche Montparnasse, 75 bd du Montparnasse, Paris 6e. Tél. 01 45 44 50 21. www.theatredepoche-montparnasse.com Jusqu’au 3 mars.

(photo Alexis Rauber)