Sono io ?

Sur la scène du Rond-Point, un duo délicat dans un hommage à l’enfance du cirque

La scène est un gigantesque étendoir à linge : sur des fils, toute une lessive est suspendue. Sur le devant, une baignoire et un homme faisant sa toilette. « Sono io ? » Est-ce bien moi ? dit Danny Ronaldo, artiste en fin de parcours, héritier d’une longue descendance de circassiens. Réécoutant, à l’aide d’un vieux magnétophone, les cassettes des airs accompagnant sa gloire passée, il est plongé en même temps que dans l’eau de son bain, dans la remémoration des souvenirs de ses numéros révolus, numéros qu’il ne parvient plus, dorénavant, à effectuer. Vient le surprendre alors un jeune homme, valise à la main : Pepijn Ronaldo, le fils, dont c’est le retour à la maison après une absence dont on peut supposer beaucoup de choses. Car rien n’est dit, mais tout est suggéré. Un fils retrouve son père, deux temps vont être confrontés, celui du passé et celui du futur. Danny est vieillissant, devenu maladroit. Pepijn est jeune, agile, a appris d’autres techniques. Pourquoi ne pas aider son père ? Redécouvrir des numéros anciens ? Jouer à deux ?

Tendresse et malice

Issus de la sixième et septième générations des artistes Ronaldo, Danny et Pepijn ont imaginé ce dernier spectacle après la période du confinement et ses effets introspectifs. S’il est teinté d’une douce mélancolie, il enchaîne aussi les effets comiques avec ses numéros hypothétiques et improbables dont chacun se sort haut la main, bien sûr, et en complicité avec le public. Les objets et accessoires présents sur la scène prennent vie dans une fausse compétition entre les deux hommes. Quasiment muet, si ce n’est quelques borborygmes et de vagues phrases inachevées en italien, un gromelot « à la fois burlesque et universel », selon Danny, le spectacle trouve des accents musicaux quand l’un ou l’autre se met au piano ou emprunte un trombone, une trompette, un violon… Transmission, filiation, Sono io ? est un hommage au cirque et une passerelle entre le cirque traditionnel et celui de demain, un cirque à visage humain. Comme celui de Pepijn, redevenu Pierrot par la grâce de son père.  

Sono io ?     * * *

Théâtre du Rond-Point, 2bis, av. Franklin D. Roosevelt, Paris 8e. Tél. 01 44 95 98 21. www.theatredurondpoint.fr Jusqu’au 16 juin.