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Dans l’abbaye de Noirlac, une invitation à l’écoute du silence et des pierres

Comment faire entendre le silence ? Comment accueillir le visiteur au sein d’une abbaye et lui faire comprendre son architecture ? Pour répondre à ces questions, l’équipe directrice de l’abbaye de Noirlac, dans un souci d’authenticité de ce lieu spirituel, a imaginé l’envelopper d’un design sonore et faire résonner ses murs millénaires d’une partition originale. L’ensemble architectural, situé en bordure du Cher, au coeur du bocage, est aujourd’hui parfaitement restauré et est devenu depuis 2008 un Centre culturel de rencontre qui accueille de nombreuses manifestations et concerts animés par des artistes accueillis en résidence. Le son et l’invitation au silence et à l’écoute sont au centre même de la démarche initiée par Paul Fournier, le précédent directeur, en écho avec les notions fondatrices de l’ordre cistercien. Ainsi créées les conditions de l’attention, l’oreille accueille et reçoit une palette de sons, tout en restant sous la ligne du bruit de fond. Sans casque et les mains libres, comme le souligne l’actuelle directrice Elisabeth Sanson, la déambulation dans les différents lieux composant l’abbaye peut commencer, les capteurs sont en alerte.

Des miniatures sonores

Dès l’arrivée par le cellier, à l’acoustique réverbèrante, le visiteur est guidé par des sons, les haut-parleurs se déclenchant à son entrée. Passage ensuite par le cloître, carré de jardin baptisé Reflets du ciel par son concepteur Gilles Clément, où le bruit d’un filet d’eau souterrain rappelle la présence ancienne d’une fontaine, et où se mêlent sons naturels (oiseaux, cloches,…) et sons humains (voix, souffles…). Et voici l’abbatiale, dans toute son imposante majesté, avec sa réverbération apte à sublimer le chant grégorien. Désacralisée et lieu de nombreux concerts, elle accueille pour l’occasion une partition composée de miniatures sonores, jouées sur des instruments parfois disparus. D’une durée totale de 3 h 45, elle mêle musique ancienne et contemporaine, duos d’instruments ou de voix, faisant passer du XIIe au XXIe siècle. La qualité sonore et musicale liée à l’intensité du lieu fait de cette halte un moment mémorable. Dans le chauffoir, assis sur des sièges avec écouteurs intégrés, on peut entendre un poème dramatique pour quatre voix masculines, évocation de la figure du moine et de sa parole intérieure. Recto tono dans le réfectoire, ton monocorde pour dire des textes, ici des passages tirés des sermons de saint Bernard de Clairvaux, dont les plus connus commentent le Cantique des cantiques.

L’apprentissage du son

A l’étage, les chambres des moines ont des oreilles et les murs murmurent. Si l’on y colle ses oreilles, on décèle des bruits infimes, propres à réveiller la mémoire du lieu. Cette chambre aux acousmates réalisée par Michel Risse est remplie de sortilèges. Enfin, le dortoir des convers où la géograhie sonore de Thierry Besche fait entendre des ambiances naturelles captées près de l’abbaye, dans la prairie ou sur les rives du Cher et d’autres sons jouant avec le vrai et le faux. Une écoute à renouveler à chaque changement de saison… Chaque proposition sonore est inspirée par le lieu, en fonction de sa réverbération. Certains sons ont été enregistrés en studio, ils sont au nombre de trois dans le lieu, dont un outil unique au monde, ouvert à des ateliers. Héritage du passé, l’abbaye de Noirlac est un lieu ancré dans le temps présent et ouvert sur l’avenir.

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Abbaye de Noirlac, 18 200 Bruère-Allichamps. Tél. 02 48 62 01 01. www.abbayedenoirlac.fr