La dernière édition du Festival international des Jardins met en scène le vivant au cœur du jardin
Alerte sur le vivant ! Qui, mieux que les professionnels de la culture, peuvent réfléchir aux problèmes du réchauffement climatique, du manque d’eau, de l’appauvrissement des sols ? C’est pourquoi le thème retenu de la dernière édition du Festival international des jardins était « jardin source de vie », répondant en cela aux enjeux écologiques. Ainsi, dans chaque parcelle du Festival, ou presque, on note la présence de l’eau, du bois, des insectes et autres petits animaux, la vingtaine de projets retenus ayant en commun de mettre en avant la force du vivant dans ce lieu majeur de pollinisation que représente le jardin. De là à se mettre à la place des insectes, c’est ce qu’a fait le paysagiste américain Scott Biehle, qui a imaginé, en suivant le dessin de New York et de Central Park, un paysage de tours d’abeilles, de maisons d’oiseaux et de chauves-souris, créé par des pollinisateurs. Après Pollinators City, Stigma fait aussi la part belle aux insectes tandis que Le jardin des murmures interroge sur la verticalité urbaine et ses opportunités d’habitat pour davantage de plantes, d’insectes et d’animaux. Sur un sol de béton concassé, des structures cimentées y accueillent une végétation sauvage.
L’eau, élément vital, et des arbres morts
La gestion de l’eau, elle, et sa récupération sont au cœur de Générosité de la nature et Cher jardin, prends soin de moi, d’une équipe italienne, laisse découvrir à travers une galerie de bambous, suivant un chemin vert en bois, des micros étangs, lieux de vie pour poissons et nénuphars, et aussi des arbres fruitiers, plantes aromatiques et un potager. Le bois sacré, de l’architecte paysagiste Philippe Allignet tourne autour d’un arbre tombé et met l’accent sur la redynamisation forestière, la régénération. Dans la même veine, Parenthèses (re)naissantes montre la résurgence du vivant avec ses souches devenues jardins miniatures. Polémoflore, réalisation française, impressionne par l’image brute d’une faille profonde, rappel des tranchées de guerre. Depuis un belvédère, on découvre le renouveau de la flore, comme une image de réparation. Le jardin du paradoxe, réalisation belge, évoque les effets du dégel avec la fonte du pergélisol et sa libération de l‘ammoniac. Une sculpture représentant un herbier de la végétation du passé interroge sur notre adaptation aux changements climatiques.
La blancheur au jardin
Deux jardins surprennent par la prédominance de la blancheur : le Jardin pastoral, réalisé par une équipe française, qui associe le végétal et l’animal avec ses sols recouverts de laine de mouton, utilisée comme capteur d’humidité. Expérimenté depuis un an, ce nouveau « paillage » pourrait être un débouché pour la laine (notre photo). Le Théâtre du rideau blanc, plus conceptuel, réalisé par des scénographes dont l’une ayant travaillé avec Bob Wilson, met en scène un paysage nordique, blanc comme neige avec ses allées en poudre de verre et ses parterres de perles où se détachent des conifères à l’image de comédiens sur un plateau. On peut admirer le cadre de scène depuis une banquette sous abri.
Mêlant les surprises, les audaces, la pérennité, les jardins de cette dernière édition composent une palette riche et poétique, une nouvelle réussite à l’actif de Chantal Colleu-Dumond, la dynamique directrice du Domaine de Chaumont-sur-Loire et du Festival. En marge, il ne faut pas manquer l’hommage de Bernard Lassus à François Portrat, dont la sculpture est entrée à la Collection de l’art brut à Lausanne. L’univers de cet artiste autodidacte composé de figurines et d’assemblages peints fabriqués à partir de bris de verre et d’assiettes est à découvrir absolument.
Festival international des jardins
Domaine de Chaumont-sur-Loire, 41 150 Chaumont-sur-Loire. Tél. 02 54 20 99 22. www.domaine-chaumont.fr Jusqu’au 3 novembre.
(photo Eric Sander)