Providence

Pierre Laville adapte et met en scène un texte de l’Américain Neil LaBute. La pièce dérange mais ses interprètes, Xavier Gallais et Marie-Christine Letort, sont fascinants. Reprise.

2 septembre 2001, les tours jumelles sont en cendres, le ciel est plombé de fumées, de poussières. Dans un immeuble en face, un couple contemple l’apocalypse. Lui aurait dû être à son travail, dans l’une des tours mais il était allé chez sa maîtresse, qui est aussi sa supérieure hiérarchique. Son téléphone n’arrête pas de sonner, ses proches s’inquiètent. Il ne répond pas. Pourquoi ne pas profiter du chaos pour changer de vie, disparaître ? 6 000 morts, et nous et nous ? Mais penser à « se tirer aux Bahamas, ce n’est pas très beau ». Neil LaBute dissèque le fracas qui se répercute sur la relation amoureuse et sur chacun découvrant l’autre dans ces circonstances exceptionnelles. Et de remettre en perspective leur relation, leur sexualité. Et de se retrouver face à eux-mêmes, à ne pouvoir s’échapper. C’est une pièce sèche, aux dialogues violents, parfois crus, sans atermoiements, sans épanchements que l’adaptation et la mise en scène de Pierre Laville resserrent au plus près. Le jeu des deux formidables interprètes est remarquable d’intensité et de nervosité. Xavier Gallais, encore une fois étonnant, joue tout ensemble l’ambigüité, la lâcheté, la cuistrerie, la culpabilité, le doute, et Marie-Christine Letort exprime avec acuité les profonds ébranlements, les interrogations. La pièce interpelle, dérange, eux fascinent.

(lejdd.fr 6 mai 2018)

Providence                           * *

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