Aux Bouffes du Nord, la chanteuse Alima Hamel met son histoire familiale en musique
Elle est seule dans la pénombre, plantée devant un rideau de papier sur lequel va bientôt se diriger un mini robot, objet non identifié retenu par des fils et destiné à une vocation précise. Ce petit engin mystérieux à réservoir d’encre noire faisant office de pinceau commence à tracer des lignes sur le papier. Tandis qu’Alima Hamel entame le récit de son histoire familiale, il dessine des méandres mystérieux. Carte géographique ? Circuits de la mémoire ? Parcours intime ?… Alima est née en France, de parents algériens, elle est la dernière d’une lignée de cinq filles. Chaque été, la famille retourne en Algérie, dans le village de Médéa. Quand elles deviennent adolescentes, les sœurs d’Alima ne reviennent pas en France mais restent là-bas. Alima ne veut pas de ce destin pour elle. Des années plus tard, sa mère lui apprend la mort de l’une de ses sœurs.
La décennie noire de l’Algérie
Chanteuse et musicienne de jazz (elle a collaboré avec le groupe Monkomarok et Lone Kent), Alima Hamel est retournée à Médéa pour retrouver ses sœurs qu’elle n’avait pas revues depuis dix-neuf ans. Pour elle qui chante la mort de sa soeur depuis 1997, le temps était venu d’interroger la mémoire de l’histoire familiale, de l’écrire et de la faire entendre. A travers son récit, elle rend hommage à la disparue, victime de la violence de la guerre civile des années 90. En faisant revivre Médéa, petite ville isolée au milieu des montagnes « chef d’œuvre de la nature » et pourtant berceau de massacres, elle témoigne de cette décennie noire vécue par les Algériens. Passant de la parole au chant, elle donne une force à son récit, intimement et subtilement soulignée par la mise en scène d’Aurélien Bory.
Médéa Mountains * *
Théâtre des Bouffes du Nord, 37 bis, bd de la Chapelle, Paris 10e. Tél. 01 46 07 34 50. www.bouffesdunord.com Jusqu’au 21 mars.
(Photo Gabi Pérez)