Marie Vialle crée un spectacle intime et secret adapté du roman de Pascal Quignard
Qui connaîtrait Simeon Pease Cheney, pasteur et professeur de chant, si Pascal Quignard ne s’était penché sur ce curieux destin ? L’homme (1823-1890), habitant la Nouvelle-Angleterre, est le premier compositeur ayant transcrit les chants d’oiseaux, cent ans avant Messiaen. Il a laissé un ouvrage précieux, Wood Notes Wild : Notes de la musique sauvage, dont Pascal Quignard s’est inspiré pour écrire Dans ce jardin qu’on aimait. En écho à Tous les matins du monde, il a également pour personnage un musicien veuf, inconsolé et solitaire. Il a une fille, Rosemund, dont la naissance a causé la mort de sa femme, et dont la beauté, à 20 ans, lui rappelle celle de l’épouse tant aimée. La jeune fille quitte la maison, le père s’enferme dans sa solitude et ne délaisse plus le jardin conçu par sa femme. Il transcrit les chants d’oiseaux pépiant dans sa cure, le bruit du vent, d’un robinet qui goutte… A sa mort, Rosemund publiera ses notes.
L’écoute de la nature
« Même les choses inanimées ont leur musique », a noté Simeon Pease Cheney. Le spectacle que signe Marie Vialle, interprète de Rosemund, invite à l’écoute intime des sons et autres bruits évocateurs d’une nature secrète, comme la sonorité de gouttes d’eau tombant dans un seau. Les partitions de la nature composent un concert. Là où l’écriture en appelle à l’imagination, les interprètes restituent des chants d’oiseaux et offrent les minutes délicates et poétiques d’une musique de la nature. Le spectacle accuse, certes, certaines faiblesses, quelques passages ésotériques, mais sa fragilité même dégage un charme certain et profond. Après Yann Boudaud (à Avignon), Laurent Poitrenaux est le partenaire de Marie Vialle.
Dans ce jardin qu’on aimait * *
Théâtre de la Bastille, 76 rue de la Roquette, Paris 11e. Tél. 01 43 57 42 14. www.theatre-bastille.com Jusqu’au 2 février. Tournée : du 8 au 11 février, Théâtre Garonne, Toulouse, du 28 mars au 7 avril, Célestins, Lyon, 11 et 12 avril, La Comète, Châlons-en-Champagne.
(spectacle vu au Cloitre des Célestins, au Festival d’Avignon juillet 2022)
(Photo Jean-Louis Fernandez)