Room

Au Théâtre du Châtelet, la dernière création de James Thierrée présentée par le Théâtre de la Ville

C’est un espace fluctuant, un jouet grandeur nature manipulé par un artiste unique : James Thierrée, auteur de spectacles mythiques (La Symphonie du hanneton, La Veillée des abysses, Au revoir parapluie,…). Dans cette dernière création, tel un deus ex machina, le célèbre circassien construit et déconstruit à vue un décor hanté. Sublimes limites, le sous-titre de Room, le définit plutôt justement : le spectacle connaît des moments sublimes, il comporte aussi des limites, à chacun de les apprécier. Sur le vaste plateau du Châtelet, une esthétique gothique, un immense bric-à-brac autour d’une cheminée à l’ancienne et d’un violoncelle, un canapé, un piano… A sa table de travail, l’architecte des utopies Thierrée organise l’espace et ses transformations, interrompu par un metteur en scène en quête de résultat, et de sens. Comme dans un rêve, il se passe toujours quelque chose, les éléments de décor se déplacent, les portes s’ouvrent, se referment. Les courtes scènes s’enchainent ou se télescopent dans un va-et-vient artistique permanent.

Un chaos assumé

Construction, déconstruction, quête de texte, d’auteur, de pilote dans l’avion, Thierrée bat et rebat toutes ces cartes, semble tourner en rond. Malin, il devance lui-même les critiques : « il n’y a aucune dramaturgie… » ou encore « c’est quoi la trame narrative de cette histoire ? C’est quoi, Room ? » Il assume, Room, c’est tout ça : des portes qui se déplacent, un sol qui recule puis avance, un plafond qui s’envole et cherche sa place… James Thierrée voulait faire « un spectacle qui soit un chaos assumé ». En cela, il a atteint son but. Souvent sur le devant de la scène, il n’y est pourtant pas seul, entouré d’excellents circassiens, acrobates, danseurs, chanteurs et de musiciens énergiques et talentueux : Anne-Lise Binard, Ching-Ying Chien, Mathias Durand, Samuel Dutertre, Hélène Escriva, Steeve Eton, Maxime Fleau, Nora Horvath, Sarah Manesse et Alessio Negro. Une nouveauté : il parle, en français, Italien ou anglais, et plus encore, il chante des textes écrits par lui-même, en anglais, mais ce n’est pas ce que l’on retiendra. L’artiste passe du piano au violon, exécute ses pas de danse, omniprésent, et quand il se suspend au bout d’une corde et s’envole, la magie est au rendez-vous, retrouvée. Sinon, elle est le plus souvent enfouie dans ce trop-plein fougueux.

Room                             * *

Théâtre du Châtelet, 1 place du Châtelet, Paris 1er. Tél. 01 42 74 22 77. www.theatredelaville-paris.com/chatelet.com Jusqu’au 1er juin.

(photo Richard Haughton)