Un barrage contre le Pacifique

Au Studio Hébertot, Anne Consigny adapte, met en scène et joue le texte de Marguerite Duras

C’est une petite robe à fleurs qui traverse le temps et ramène aux années d’Indochine de Marguerite Duras. Anne Consigny la portait déjà dans Savannah Bay, mis en scène par Didier Bezace en 2014, où elle jouait au côté d’Emmanuelle Riva. Quand elle accueille le public avant la représentation, la comédienne la dissimule sous un imperméable, vite enlevé dès qu’elle rejoint la scène pour retrouver l’écriture de Marguerite Duras dont elle adapte, met en scène et joue les personnages d’Un barrage contre le Pacifique (1950). Avec l’auteur de L’amant, c’est toujours la même histoire : la mère omniprésente, brisée par ses mauvais placements, le frère envieux des belles voitures, la jeune fille convoitée par le riche héritier chinois. Un univers familier et une écriture dans le flot de laquelle Anne Consigny se coule, faisant sentir à la fois la moiteur des jours, la fatalité de la situation, les rêves impossibles.

Tous les personnages

Sur scène, une fois posé l’imperméable, essayé le grand chapeau de paille, avec un escabeau pour seul accessoire, et dans une sûre économie de gestes, Anne Consigny transporte « là-bas », déroule les pans essentiels de l’histoire de la mère, et de la fille, les figures majeures. Les hommes sont là, relégués au second plan. Elle est tous les personnages, les fait vivre, rend chaque moment unique et éternel, compose, avec un art délié, un tableau ou, plus encore, un film. C’est une présence subtile qui s’enracine, une atmosphère douce et prenante qui remplit la scène. On entend le style de l’écrivain, on voit les personnages.

Un barrage contre le Pacifique    * *

Studio Hébertot, 78 bis, bd des Batignolles, Paris 17e. Tél. 01 42 93 13 04. www.studiohebertot.com Jusqu’au 12 janvier 2025.

(photo Denis Manin)