Au Théâtre du Petit Saint-Martin, Elodie Navarre et Emmanuel Noblet jouent un couple presque parfait
« C’est nous les beaux ! ». Ca commence fort sur la scène du Petit Saint-Martin où un jeune couple d’apparence parfaite se repait de son bonheur et de son contentement imbécile. Trop lisse, trop beau pour être vrai. Ces courts échanges lénifiants de béatitude imbécile sont soudain court-circuités par des voix extérieures, les échos d’une dispute violente. Le couple se cache derrière le canapé, en ressort, reprend son dialogue où s’invite par intermittence avant de finir par s’imposer une réalité beaucoup plus amère… Explication : ces ersatz de personnages ne sont que des jouets, des poupées de Ken et Barbie manipulées par Alice, 7 ans, la petite fille du couple, qui rêve de voir ses parents comme un couple amoureux. Ce qu’ils ne sont pas, et Alice ne parle plus.
Une interprétation nerveuse
Avec ce texte, publié en 2017 sous le titre Enfantillages (1), l’auteure Leonore Confino (Ring, Building, Le poisson belge,…) scrute et désintègre les relations de couple, les faux-semblants et les hypocrisies de façade. Pour illustrer cette dualité entre personnages rêvés et réels, Côme de Bellescize a travaillé et construit sa mise en scène avec les deux interprètes, Elodie Navarre et Emmanuel Noblet dont le jeu physique intense, quasi millimétré, et nerveux s’inscrit dans la matière du texte. Jouant constamment entre fantasme et réalité, ils poussent leurs limites jusqu’au malaise parfois dans des scènes terribles et drôles, dérangeantes, déclinant les différents états du couple, de la béatitude ridicule à la sauvagerie bestiale, révélant des gouffres inquiétants. Ils sont étonnants.
(1) la pièce est publiée chez Actes Sud-Papiers, sous le titre Enfantillages.
Les Beaux * *
Théâtre du Petit Saint-Martin, 17 rue René-Boulanger, Paris 10e. Tél. 01 42 08 00 32. www.petitstmartin.com
(photo Emilie Brouchon)