Au Théâtre de la Bastille, François Gremaud propose une étonnante conférence dansée par Samantha van Wissen.
Il aime à explorer les figures féminines tragiques héroïnes des arts classiques. Après Phèdre ! d’après la pièce de Racine voici Giselle… d’après le ballet romantique composé par Adolphe Adam sur un livret de Théophile Gautier et Henri de Saint-Georges, représenté pour la première fois en 1841. Bientôt, ce sera le tour de Carmen. A noter l’importance à chaque fois de la ponctuation dans les titres des spectacles. Ici, les points de suspension annoncent la fantaisie et les envols de la narratrice, Samantha van Wissen, comédienne-danseuse qui tient à préciser que wissen signifie «effacement ». Heureusement, elle n’est pas du genre à s’effacer… Et de remonter aux origines du ballet, de rappeler les fondements du romantisme et les codes de la danse classique avant d’entrer plus avant dans le livret écrit par Théophile Gautier pour Carlotta Grisi, une ballerine qu’il aimait. Elle indique les décors inexistants, les différents lieux où vont se croiser les protagonistes, leurs rencontres. En fond de scène, quatre musiciens (violon, flûte, harpe et saxophone) interprètent la musique d’Adolphe Adam arrangée par Luca Antignani.
Le ballet classique revu
Le procédé pourrait sembler facile, simplificateur et réducteur, mais la danseuse (qui a fait partie de la troupe de la grande Anne Teresa De Keersmaeker), par sa gestuelle, son regard ironique sur les différentes interprétations, son sens de la pantomime, son humour, ses improvisations dépoussièrent la danse académique. Des pas de danse, des jetés rythment ses propos et redonnent une couleur et une dynamique au ballet classique, jusqu’à donner l’illusion de voir s’agiter les tutus blancs des trente-deux Wilis (les jeunes filles « mortes d’avoir trop aimé la danse ») dans le spectaculaire tableau du deuxième acte ! Commencée sur un ton ironique, la conférence prend un tour plus tendre au fil de l’action. La prouesse réalisée par Samantha van Wissen avec une sensibilité, une fraicheur et une grâce naturelles épate autant qu’elle séduit. Après elle, il est sûr qu’on ne verra plus le ballet classique de la même façon.
Giselle… * * *
Théâtre de la Bastille, 76 rue de la Roquette, Paris 11e. Tél. 01 43 57 42 14. www.theatre-bastille.com Jusqu’au 24 janvier. Tournée : Alençon, 26 janvier, 28 et 29 janvier, Antony, Châtenay-Malabry, 1er et 2 février, CCN Caen et Théâtre de la Renaissance, Mondeville, 7 février, Le Zef, Marseille, 10 février, Nîmes, 24 février, Luxembourg, 28 février, Forbach, 4 mars, Bicubic- Romont (Suisse), 5 mars, Nebia-Bienne (Suisse), 30 mars, Opéra de Dijon, 8 et 11 juin, Théâtre de Vidy-Lausanne (Suisse).