Au Lucernaire, Pierre Pradinas met en scène des petites formes de Tchekhov
Ce n’est pas faute de les connaître, pour les plus souvent jouées, et pourtant on les redécouvre à chaque fois, ces petites pièces de Tchekhov avec leurs personnages de la Russie du XIXe siècle qui n’ont pas pris une ride. Moins connues et représentées sont ses nouvelles. Pierre Pradinas a imaginé un collectif de neuf comédiens et comédiennes se relayant pour présenter chaque soir, en alternance, deux pièces courtes et une nouvelle. A savoir Les méfaits du tabac, L’ours, Une demande en mariage, pièces traduites par André Markowicz et Françoise Morvan, et les deux courtes nouvelles La mort d’un fonctionnaire et Un drame, traduites par Elsa Triolet. Chaque spectacle débute par une étrange conférence sur Les méfaits du tabac donnée par un personnage tchekhovien par excellence : « maintenant je ne demande plus rien… le repos » Entre fatalisme et ironie, Philippe Rebbot ajoute une pointe de désespoir au registre de l’absurde et du rire grinçant.
Du rire au meurtre
Nulle résignation, en revanche, chez les protagonistes de Une demande en mariage qui ne manquent pas une occasion pour s’indigner, se quereller. Comment, alors, imaginer la possibilité d’une union ? Ou alors à envisager la dispute comme le ciment du couple… Ce que laisse entrevoir l’auteur dans cette pièce à la mécanique comique infaillible. Les scènes écrites par l’auteur russe sont une infaillible machine à jouer pour les comédiens tant les personnages sont rigoureusement dessinés derrière un abord ordinaire. Ainsi dans Un drame, entre narration et jeu, où la situation, banale, connaît une fin radicale. Même dans ces formats réduits, toute l’humanité est là, celle que Tchekhov a si bien révélée dans ses pièces d’anthologie. La mise en scène simple et directe de Pierre Pradinas n’alourdit rien et l’interprétation, toutes générations confondues, est légère et parfaite, des plus jeunes, Romain Bertrand et Laure Descamps comme de leurs ainés, Quentin Baillot et Philippe Rebbot. Une saine et franche récréation.
Farces et nouvelles de Tchekhov * *
Lucernaire, 53 rue Notre-Dame-des-Champs, Paris 6e. Tél. 01 45 44 57 34. www.lucernaire.fr Jusqu’au 7 janvier.
(photo Marion Stalens)