Pueblo

Au Rond-Point, David Murgia interprète le deuxième volet de la fable politique d’Ascanio Celestini. Une performance haletante

Après Laïka (déjà au Rond-Point en octobre 2018), Ascanio Celestini poursuit son récit des aventures du quotidien et des histoires de vie, une « trilogie des bars » dont voici le deuxième volet, Pueblo. Où l’on retrouve le débit furieux de David Murgia pour raconter toute une humanité dans sa diversité. Ici, le narrateur imagine la vie de personnes qu’il croise mais ne connaît pas. Depuis la fenêtre de son petit appartement, il invente la vie de ceux qui sont autour de lui, en face de lui. Il raconte la vie de cette jeune femme, caissière au supermarché et de ceux qu’elle croise. Il y a des marginaux, comme cette clocharde qui squatte un local, ce manutentionnaire sans papiers, ce gitan de huit ans, ou encore une tenancière de bar… Une histoire en entraine une autre, une vie succède à l’autre, de ces vies minuscules de personnages ordinaires, des gens de peu, écrasés par le système, en marge de la société. Et puis il y a les fantômes qui aident les vivants à tenir, et puis il y a ceux qui meurent au fond de la mer…

Un rythme effréné

Avec Pueblo, Celestini donne une dignité aux nouveaux pauvres, aux invisibles. Sans misérabilisme, mais dans une veine réaliste et avec une poésie stimulante. Les histoires se découvrent comme des poupées russes… David Murgia (traducteur et adaptateur du texte avec Patrick Bebi) n’a pas son pareil pour emballer l’écriture vibrionnante et imbriquer les récits et les personnages, révélant derrière chacun une couleur unique, une richesse souterraine. La parole est fiévreuse, parfois répétitive, le rythme haletant, de plus en plus rapide, vertigineux. Entre conte et récit théâtral, narration et dialogues s’entrecroisent, mêlées aux musiques de Gianluca Casadei, jouées par Philippe Orivel à l’accordéon, qui racontent autant que le texte. Dans la veine de la tradition orale qui fait vivre les contes de toujours et les histoires sans fin. Derrière la performance, une bouffée d’humanité.

(spectacle vu au Théâtre Jean-Vilar le 16 décembre 2021)

Pueblo   * * *

Théâtre du Rond-Point, 2bis avenue Franklin D. Roosevelt, Paris 8e. Tél. 01 44 95 98 21. www.theatredurondpoint.fr Du 11 au 23 octobre. Maison de la culture de Tournai (Belgique) le 15 novembre, Théâtre des Célestins, Lyon, du 6 au 17 décembre, Théâtre Sorano, Toulouse, le 21 avril.

(Photo Céline Chariot)